Le métissage, comme l’amour, se fait à deux… Jean-Pierre Vidal…

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241. — Reconnaître l’intelligence n’est pas à la portée du premier imbécile venu ; de nos jours, c’est même plutôt à sa merci.

242. — Les médias de masse exigent « de l’émotion » comme on demande du sang ou de la viande. C’est leur seul critère esthétique et éthique. Mais les masses n’ont d’autre émotion que la jouissance narcissique du nombre et l’obsession de l’unanimité tranquille. Ou au contraire la singularité quand elle semble absolue : le tueur monstrueux, les destins extravagants, les salaires fabuleux, les chiffres faramineux, l’exploit tout bête, tout nu, tout nul. Ce n’est, bien entendu, pas de cette singularité-là que vit l’art.

243. — Le métissage, comme l’amour, se fait à deux. Quand on se contorsionne à cinquante autour du feu de camp, cela n’est plus de l’amour, c’est une partouze ; cela n’est plus du métissage, c’est une identité. Multipliez les origines de mes gènes et cette pluralité me fait plus singulier que métis.

244. — L’intelligence devrait toujours être un grand écart, pas une appropriation tranquille du monde, mesurée et mesquine comme un compte d’épargne à intérêt quotidien.

245. — Chaque fois qu’un être humain en tue un autre, il le fait à cause de l’animal en lui. Mais quand un état exécute et assassine légalement, il le fait au nom de la civilisation. Voilà pourquoi la peine de mort est inacceptable aussi d’un point de vue rationnel : elle est une contradiction dans les termes. Car si la civilisation est peut-être, comme l’a prétendu Freud et comme semblent le dire tous les mythes, fondée sur le meurtre, tout son projet n’en consiste pas moins à tenter de se débarrasser de ce qui est, somme toute, son péché originel. Plus une civilisation est évoluée, moins elle tue.

246. — De nos jours, la seule différence entre la guerre et le commerce, c’est que le commerce tue plus proprement. En général.

247. — Les tièdes sont toujours ceux dont le couvercle saute toujours le plus haut quand toutes les marmites bouillent.

248. — Quand on s’abaisse une fois, fût-ce pour conquérir, comme dans la comédie de Goldsmith, on prend tout de suite le pli et on finit par rester courbé en permanence. Aucune conquête ne vaut l’honneur de rester droit.

249. — Dieu nous déborde et nous pénètre de toutes parts. Il est pour nous l’incommensurable même. Mais c’est de cet incommensurable que nous tenons notre mesure, c’est-à-dire l’ombre pas toujours claire que nous reconnaissons porter sur le monde.

250. — Le vendeur est encore plus esclave que celui qu’il pourchasse de son insistance.

Notice biographique

Écrivain, sémioticien et chercheur, Jean-Pierre Vidal est professeur émérite de l’Université du Québec à Chicoutimi où il a enseigné depuis sa fondation en 1969.  Outre des centaines d’articles dans des revues universitaireschat qui louche, maykan, alain gagnon, francophonie, québec, littératurequébécoises et françaises, il a publié deux livres sur Alain Robbe-Grillet, trois recueils de nouvelles (Histoires cruelles et lamentables – 1991, Petites morts et autres contrariétés – 2011, et Le chat qui avait mordu Sigmund Freud – 2013), un essai en 2004 : Le labyrinthe aboli – de quelques Minotaures contemporains ainsi qu’un recueil d’aphorismes,Apophtegmes et rancœurs, aux Éditions numériques du Chat qui louche en 2012.  Jean-Pierre Vidal collabore à diverses revues culturelles et artistiques (SpiraleTangenceXYZEsseEtcCiel VariableZone occupée).  En plus de cette Chronique d’humeur bimensuelle, il participe occasionnellement, sous le pseudonyme de Diogène l’ancien, au blogue de Mauvaise herbe.  Depuis 2005, il est conseiller scientifique au Fonds de Recherche du Québec–Société et Culture (F.R.Q.S.C.).

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)

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