Train-train quotidien
Que faisait-on avant dans les trains ? On regardait passer le paysage, on regardait passer le temps, sans avoir peur de le perdre, sans avoir peur de ne pas le rentabiliser. L’éventualité de l’ennui ne vous prenait pas à la gorge. Au contraire. On se plaisait à savourer l’ennui et le paysage pouvait bien s’accélérer, notre regard partait au-delà : il se noyait langoureusement dans la rêverie errante et le roulement rythmait gracieusement nos songes.
Que faisait-on avant dans les trains ? On lisait. Sans chiffres, sans écrans. Il existe aujourd’hui des sortes de livres, pour les nostalgiques. L’odeur des pages, comme une fragrance, enveloppe les histoires d’un nimbe chaleureux, douillet, nous protégeant des autres. Mais sur la blancheur des pages, il n’y a que des chiffres. Des tirets en guise de ponctuation.
Désormais, tu peux faire Paris-Turin en dix minutes. Le temps ne se savoure plus, ne coule plus dans la gorge ; il demeure coincé aux portes de notre bouche, triste comme la mort.
Ce monde te déplaît.
Notice biographique
Clémence Tombereau est née à Nîmes en 1978. Après des études de lettres classiques, elle a enseigné le français en lycée pendant cinq ans. Elle vit actuellement à Milan, en Italie. Finaliste du prix Hemingway en 2005, lauréate cette année du concours littéraire organisé par le blogue Vivre à Porto, elle a contribué à la revue littéraire Rouge-déclic (numéro2) et elle nourrit régulièrement un blogue que vous auriez intérêt à visiter : le Clémence Dumper :http://clemencedumper.blogspot.com/
Oui,ce monde me déplaît.
Je reste nostalgique des trains d’avant,le temps ne comptait pas.
Les paysages m’envoûtaient,m’emportaient dans des rêves où tout devenait possible,j’étais libre..
Merci Clémence pour cette très belle chronique qui nous
éloigne du train-train quotidien.
Amitiés.Christine.
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